Frédéric HELBERT, journaliste d'investigation

Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre, il est de porter la plume dans la plaie. (Albert Londres)


Le sommet du G7 à Biarritz? Un grand flic valide le choix le la ville. Explications. Cartographie dispositif sécurité et menaces.

Publié le 21/08/2019 à 14h58 | , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,  | Écrire un commentaire

 

FH – Vous êtes un très haut fonctionnaire honoraire de la Police Nationale. Un grand flic, comme on dit. Vous avez exercé à tous les échelons, et eu des fonctions importantes de direction opérationnelle de dispositifs de sécurité anti-terroristes ou d’ordre public, liés à la tenue de grandes manifestations politiques, sportives, mémorielles ou autres, à caractère international, se tenant sur le sol français. Quelle a été votre réaction lorsque vous avez appris que le sommet du G7 se tiendrait à Biarritz ?

– Contrairement à ce que j’entends parfois, et à ce qu’aurait dit un responsables du renseignement intérieur, à l’un de vos confrères (France-Info),  je valide pleinement ce choix. Biarritz pour moi est un endroit parfait pour un événement du type G7. Et je ne suis pas le seul professionnel à le penser. Quand il y a des sommets de ce type, il y a trois impératifs de base à respecter: le 1erc’est de trouver un site qui soit relayé dans le monde entier pour son image. Une belle vitrine du pays. A ce titre Biarritz est un lieu idéal. Le second est de trouver un endroit où il y ait sur une zone très concentrée, un maximum d’hôtels de luxe et de qualité, pour recevoir tous les chefs d’état, toutes les délégations, et installer les infrastructures nécessaires, en limitant les distances de déplacement. C’est un impératif à la fois de sécurité et médiatique. Là encore, Biarritz coche les bonnes cases. Le 3èmepoint c’est de trouver un lieu de configuration globalement restreinte. Parce que faire la même chose à Paris, Lyon, ou à Marseille, cela revient à être obligé à bloquer la ville toute entière ! Je sais que pour les habitants de Biarritz, ce n’est pas évident, mais si vous appliquez les mêmes contraintes à de des grandes villes, vous vous retrouves face à un cauchemar logistique et un bazar sans fin. Et cela nécessiterait infiniment plus d’effectifs et de blocages. A Biarritz, tout est concentré dans une zone rouge, sanctuarisée, de faible dimension, où aucune personne jugée suspecte ne pourra bouger sans être repérée, mais où les délégations circuleront rapidement d’un point à l’autre, sans risques ni problèmes. Une autre zone dite bleue, où les contraintes sont moindres, permet de vraiment saturer de sécurité une partie de la ville. Voilà les 3 impératifs à la fois de sécurité, et d’images qui ont guidé un choix qui se défend parfaitement.  La sécurité, celle des chefs d’états, ou de gouvernements sera pleinement assurée. Il est quasiment inenvisageable selon moi, avec le dispositif mis en place d’envisager qu’ils soient menacés directement, de quelque manière que ce soit. Et c’est là le point crucial.

– Donc vous validez Biarritz, mais pourquoi donc avoir choisi cette date, la fin des vacances, alors que la cité balnéaire tourne encore à plein avec des milliers de touristes ?

– Alors là, je vous avoue que cela reste un point d’interrogation pour moi. En 1994, je me souviens j’y étais on avait organisé un sommet France-Afrique avec 45 chefs d’états ! Devinez ou ? à Biarritz ! Mais c’était en octobre… Si l’on regarde moins loin dans le temps, le G G20 en 2011 s’était tenu à Cannes. Là encore en octobre. La même année la France organisait le G8 a Deauville, en mai, avant le début de la saison touristique. Donc il y a la un choix qui pose questioncertes,  non sur le lieu mais sur le timing. Maintenant, je pense qu’i il doit y avoir des contingences politiques et d’agenda qui ont dicté ce choix. On peut penser que Emmanuel Macron a voulu enchainer une très forte séquence diplomatique (Poutine reçu à Brégançon et G7), mettant la France et le président en pointe, avant qu’il soit, comme son gouvernement obligé à mettre les mains dans le « cambouis » de tous les dossiers d’une rentrée économique, sociale, et législative qui s’annonce difficile. C’est un choix politique. Les biarrots et les touristes devront faire avec pendant 4 jours. Ce n’est pas la mer à boire non plus.

– Quelles menaces potentielles identifiez-vous ?

– La menace terroriste est toujours présente dans les pensées. Il ne faut pas baisser la garde. Mais justement le choix de Biarritz, permettant de mettre sur pied une zone totalement hermétique, « aseptisée », fait que j’estime que le risque d’une attaque terroriste n’est pas envisageable. La façade maritime est ultra-sécurisée, et le dispositif dont on parle peu mais qui est énorme en matière de sécurité et de couverture aérienne, en collaboration avec les espagnols, ramène pour moi la menace terroriste au niveau zéro, en tous les cas dans les zones supposées à risque.

Reste les violences qui pourraient être liées au contre-sommet altermondialiste. C’est la menace la plus prégnante, avec les Blak-blocs, les gilets jaunes, les Antifas, les casseurs de flics, les nationalistes basques, qui sont toujours là et devraient venir tenter de se greffer à ce contre-sommet se voulant totalement pacifique… Maintenant,  de ce coté-là aussi, il y a un « dispositif préventif » énorme mis sur pied. Dispositif plus discret pour tenter d’éviter les provocations. Avec la possibilité pendant quelques jours de neutraliser toutes volontés de violence, tout franchissement de « ligne jaune ». C’est un très gros dispositif coordonné qui permet 300 gardes à vues par jour, mais sur une très courte durée. Magistrats comme avocats sont sur le « pied de guerre ». J’entends les cris d’orfraies de certains de certains quant à la mise sur pied d’un tel dispositif… Moi qui suis un vieux de la vielle, très à cheval sur la déontologie, ca me fait sourire ! Les gens ont la mémoire courte. En 1998, pour la coupe du monde en France, on avait mis sur pied, et c’était alors une nouveauté, un dispositif judicaire préventif d’une ampleur du même type. Avec une cohorte de magistrats de permanence 24/24, et d’un qu’il y avait incident, les policiers interpellaient, et ceux qui étaient sortis du cadre étaient jugés, condamnés, expulsés s’ils étaient étrangers, et « mis au frais » le temps de la compétition s’ils étaient français. Alors cela ne date pas d’hier voyez-vous ! Maintenant, c’est vrai qu’il y a eu l’épisode des gilets jaunes qui a duré, duré, donné lieu à des débordements de tous cotés, des polémiques interminables, parfois justifiées, mais là, au pays basque, pour un événement qui va durer 4 jours, ca sera pas la même donne. Tout est organisé pour que les droits de ceux qui seraient interpellés soient respectés, et que les choses se passent dans la dignité et le respect des droits fondamentaux.

– Les incidents violents restent néanmoins possibles, voire probables, quel que soit le travail préventif que vous évoquez et que d’autres dénoncent comme le fait d’un état policier…

– Absolument, cela reste possible. Mais déjà en « délocalisant » le contre-sommet à Hendaye, on préserve le G7 de tels incidents, comme ceux survenus avec une rare violence lors du sommet de Gênes, (émeutes, un manifestant tué, violences policières condamnées depuis). Le dispositif d’ordre public est tel, avec un suivi judiciaire immédiat, que cela devrait permettre d’anticiper et de limiter la casse, si casse il doit y avoir. Il faut l’espérer et espérer qu’il n’y aura pas de coup dur, de part ou d’autre. Mais, je tiens à le préciser encore une fois, les arrestations préventives présentées par certains comme étant le symbole d’un « état policier », cela a toujours existé, tant sous les gouvernements de gauche que de droite, sous lesquels j’ai travaillé à l’organisation de telles manifestations. Et cela ne me choque pas, dès lors que les choses sont faites dans le respect strict du code de procédure pénale. De tous cotés. C’est un point essentiel pour ramener un peu de concorde dans un pays sans cesse au bord de la crise de nerfs. Et faire en sorte que l’attention des médias se focalise essentiellement sur les enjeux colossaux du G7, et non sur d’éventuelles violences qui pourraient y être liées.

Propos recueillis par Frédéric HELBERT.  


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À propos de l'auteur

Grand-reporter de guerre, (souvent), journaliste d'investigation, multi-médias, tous terrains, membre de l'association de la presse judiciaire, passionné par les phénomènes terroristes depuis le début de ma carrière à Europe11. Tropisme assumé pour le Moyen-Orient et la péninsule arabe-musulmane. Jamais rassasié d'infos,  accro à tous types d'enquêtes et reportages, j'aime explorer le dessous des cartes de dossiers sensibles. En toute liberté. Vos témoignages, vos infos, vos commentaires sont  bienvenus!

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