Frédéric HELBERT, journaliste d'investigation

Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre, il est de porter la plume dans la plaie. (Albert Londres)


La menace terroriste contre la France. Etat des Lieux. Alerte rouge partout.

Publié le 09/06/2012 à 05h26 | ,  | Écrire un commentaire

EXCLUSIF

Révélation du contenu d’un enote confidentielle rédigée après l’affaire Merah sur la menace terroriste visant la France, adressée alors à François Hollande. L’audit a été effectué par un technicien qui a voué une grande partie de sa vie à l’anti-terrorisme, et connait toutes les arcanes du métier, tous les acteurs du domaine. Il n’est pas un conseiller de cabinet, patron d’un quelconque observatoire, universitaire, homme d’obédience appartenant à je ne sais quelle chapelle. Il a participé au démantèlement de nombre de réseaux opérationnels. A dirigé des opérations permettant d’éviter le pire au dernier moment. S’il n’appartient plus au staff anti-terroriste français, pour des raisons (déplorables) liées à sa nécessaire évolution hiérarchique, il reste l’un des meilleurs connaisseurs et analystes d’al Qaida, du terrorisme islamiste sous toutes ses facettes et de l’évolution du jihadisme. Il a été l’un des rares hauts-personnages du petit monde Renseignement/Services Police et Justice spécialisés, qui a su par exemple que la France avait averti les autorités américaines, un mois avant les attentats du 11 septembre, que l’arrestation du djihadiste franco-marocain Zacarias Moussaoui, alors que celui-ci prenait des cours de pilotage sur le sol US,  était le signal d’une offensive d’ampleur imminente. Signal ignoré et perdu dans le maquis des multiples services de l’administration US. (Information que je révélais en exclusivité mondiale le 14 septembre 2001 sur l’antenne d’Europe1). Cet homme toujours d’active, mais hors du système anti-terroriste, a dressé un inventaire exhaustif de la menace visant la France, sans concession, ni prudence de langage, pour informer celui qui pouvait être le futur chef de l’état. Voici la teneur de sa note sobrement intitulée: L’état de la menace.

1- Persistance et aggravation de la menace islamiste, quelle que soit le changement de politico-militaire en Afghanistan

L’auteur de la note signale d’abord le haut-degré « d’une menace essentielle et permanente qui va perdurer et s’aggrave: Le terrorisme islamiste. Il invite  » à ne pas s’illusionner sur l’impact de certains changements comme notre retrait progressif d’Afghanistan. Il ne faut pas mésestimer la véritable détestation de la France ancrée chez bon nombre d’islamistes. Or la France laïque incarnée par un gouvernement SOCIALISTE ne sera, estime t-il, que plus honnie par ces extrémistes « .

Il insiste particulièrement sur « deux motifs sérieux d’aggravation de cette menace:

2- « Islamisation galopante des banlieues »

 » Un extrémisme fondamentaliste de plus en plus implanté sur le territoire, facteur de « basculements » très rapides vers des positions jihadistes. Une situation sans commune mesure avec celle que la France connaissait au milieu des années 90, lors de la dernière vague d’attentats. Il revient, sans aucune connotation politique sur le danger  » d’une islamisation de plus en plus dévorantes de certaines banlieues observée par les services spécialisés « .

3- Situation au Sahel

 » Et la situation de la zone sahara-sahélienne, qui constitue l’autre facteur d’aggravation de la menace sur place, avec une évolution notable: Ce ne sont plus seulement nos compatriotes sur place (attentats ou prise d’otages) qui sont dans le collimateur. AQMI a désormais la capacité de frapper sur le territoire français. Le Mali est entrain de devenir notre Afghanistan » dit-il, rejoignant l’analyse des services de renseignements, qui inquiète particulièrement le nouveau ministre de la Défense, jean-Yves le Drian.

 » D’un point de vue général explique t-il , au cours des 25 dernières années, des organisations jihadistes se sont greffées sur chacun des conflits de toute nature, s’étant déroulées dans des zones d’implantation de population musulmanes, et ces groupes, ont systématiquement diffusé des actions hors de ces seules zones. ce fut le cas dans les années 90, tant avec la véritable guerre entre les groupes islamistes et l’Armée en Algérie, (qui perdure à bas bruit) qu’avec les guerres des Balkans (Bosnie, Kosovo) et du Caucase (Tchetchénie…) pour les lus proches. Ce fut le cas aussi pour des conflits plus lointains comme au Cachemire, en Indonésie aux Philippines, en Irak, et bien entendu et avant tout dans la zone Pakistano-Afghane. A chaque fois, avec une plus grande intensité liée à la proximité géographique ou historique de ces zones avec la France, et avec l’instauration et le renouvellement permanent de filières d’envoi d’islamistes sur ces fronts. Les répercussions de ces conflits se sont systématiquement traduites par des actions jihadistes en France, à visée de propagande ou « opérationnelles ».

 » Ces répercussions sont maintenant visibles et menaçantes s’agissant de la zone Sahara-Sahélienne. Les conflits qui s’y déroulent, à notre porte depuis plusieurs années et le récent effondrement du Mali, conjuguée à la prise de contrôle d’immenses territoires pour les combattants islamistes, traduction de leur montée en puissance progressive ne concerne pas que la zone allant de la Mauritanie au Tchad, mais il touche DIRECTEMENT LA FRANCE SELON TROIS STRATES. 1- Compte-tenu de nos intérêts su place qui vont rapidement, si ce n’est déjà fait, nous conduire à rentrer en conflit avec ces organisations. 2- De la part de ces organisations qui voient dans la France, ancien pays colonisateur, plus que tout autre pays européen, un ennemi de premier plan. Il ne faut pas oublier d’une part qu’AQMI est le successeur du GSPC, issu lui-même du GIA 2ème secteur, d’autre part que la campagne d’attentats de 1995 a résulté de la décision du GIA d’exporter vers la France la guerre qu »il menait contre l’état algérien. 3- Enfin au regard des importantes populations originaires des pays de cette zone résidant sur notre territoire, une donne qui n’échappe pas aux stratèges islamistes ».

4- Conséquence du « Printemps arabe »: Dislocation des services de renseignements locaux

Le rédacteur de la note souligne par ailleurs, ce qui a échappé à bien des analystes, et qui est un motif fondamental d’inquiétude, d’origine extérieure:  » LE TARISSEMENT D’UNE DES PRINCIPALES SOURCES DE RENSEIGNEMENTS EN PROVENANCE DE PLUSIEURS PAYS ARABES. Outre une lisibilité très réduite des évolutions du « Printemps arabe », la nouvelle donne mise en place en Tunisie, en Egypte, en Libye, de même que la situation en Syrie, ont une répercussion très directe pour la connaissance de la menace visant la France: La réorganisation (ou désorganisation) complète des services de renseignements de ces pays a pour conséquence que nos propres services comme la DGSE ou la DCRI, ne sont plus que très peu destinataires d’informations indispensables de certains de des ressortissants de ce pays susceptibles de viser la France. Au delà de toute appréciation politique, morale ou juridique, le constat est patent et en l’absence de ces renseignements ( qui ont plusieurs fois par le passé permis de « casser » des réseaux opérationnels en France), l’exigence d’anticipation est déjà devenue bien plus complexe « .

5- Evolution des réseaux et des techniques, autres menaces.

Trois autres motifs d’inquiétude sont mis en évidence dan la note:

 » La parfaite adaptabilité des islamistes aux nouvelles technologies, pouvant rendre plus opaques leurs activités. Leur très bonne connaissance des techniques policières et judiciaires et leur aptitude à déjouer les investigations les concernant (des manuels dédiés spécialement à cet effet ont parfois été saisis ors du démantèlement de cellules terroristes). Une nouvelle forme d’engagement individuel via internet bien plus difficile à déjouer en amont ».

Enfin l’expert ne néglige pas certaines menaces dont le degré d’intensité peut évoluer dans un contexte de grande incertitude: Le terrorisme Corse, qui s’est montré particulièrement virulent ces derniers temps, et qui est accolé à l’affairisme, et au grand-banditisme sur l’Ile. La menace plus faible mais non négligeable de l’ETA, organisation pour laquelle la France reste un base logistique, mais qui peut réagir violemment aux coups qui lui sont porté sur le territoire national.  Il évoque aussi l’incertitude quant à l’émergence dans un société fragile d’un terrorisme d’extrême-droite, ou la réapparition d’un terrorisme de l’ultra-gauche, calqué sur le modèle d’Action Directe dans les années 80.

6- La menace du terrorisme d’état syrien

Dernier point et non des moindres:  » L’hypothèse d’un risque majeur: le retour d’un Terrorisme d’ETAT, d’origine SYRIENNE ou IRANIENNE (dont la France a déjà pâti sévèrement) , dans le contexte d’une brusque aggravation des relations avec l’un de ses états ».

A ce titre, si les enquêtes sont restées volontairement au point mort, je rappelle que par deux fois depuis l’an dernier des convois de casques bleus français appartenant à la FINUL stationnés au Liban-Sud ont été victimes d’engins piégés. Des attentat n’ayant fait que des blessés, mais interprétés clairement par les analystes de la DGSE, comme des avertissements lancés par les forces soutenant le régime syrien de Bachar el Assad au Liban. Les actions délibérées ayant causés la mort des journalistes Gilles Jacquier et Rémi Ochlik  en Syrie relèvent clairement d’un terrorisme d’état ciblé, et non d’actions de guerre, mais les enquêtes en France, n’ont pas été confiées à l’époque à des juges anti-terroristes spécialisés.

C’est dans ce contexte, que le nouvel Etat socialiste, a décidé de confirmer à son poste, malgré une valse des têtes au sein de plusieurs services de sécurité, le patron de la DGSE, le préfêt Erard CORBIN de MANGOUX nommé par Nicolas Sarkozy à la tête de la DGSE, mais considéré comme un grand-commis de l’état et ayant parfaitement tenu la « boutique » dit-on en interne. Par ailleurs, pour remplacer le très controversé Bernard SQUARCINI à la tête du contre-espionnage français, c’est l’option technique, et la meilleure, dit un homme de l’art, qui a été choisie, avec la nomination de Patrick CALVAR, pur « produit » de l’ex-DST, et qui avait été d’ailleurs le premier policier à occuper le poste de chef du Renseignement à la DGSE. Enfin un temps menacé, Ange MANCINI, chargé de « mettre de l’huile » entre la DCRI et la DGSE, garde son poste de coordinateur national du Renseignement Français.

Reste que, tant sur le territoire national, qu’à l’étranger, tous les signaux d’alerte sont au rouge. La France compte tenu de son histoire, son passé, de sa proximité avec l’autre rive de la Méditerannée, des positionnements politiques ou sociétaux (interdiction du port du voile à l’école, du nikab dans les lieux publics), de ses choix diplomatiques, (Algérie, Afrique, Syrie), de son retour au sein de l’alliance atlantique (OTAN) décidé par Nicolas Sarkozy, est désormais pour nombre d’experts, la cible n°1 dans le collimateur des islamistes en tout genre, devant même les Etats-Unis.

le rédacteur de la note n’a jamais oublié le crédo inlassablement répété par des terroristes arrêtés auxquels il a été régulièrement confronté:

 » Nous, nous n’avons pas peur de mourir, vous si! Nous avons Dieu avec nous et l’éternité devant nous pour gagner notre combat »

FH


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À propos de l'auteur

Grand-reporter de guerre, (souvent), journaliste d'investigation, multi-médias, tous terrains, membre de l'association de la presse judiciaire, passionné par les phénomènes terroristes depuis le début de ma carrière à Europe11. Tropisme assumé pour le Moyen-Orient et la péninsule arabe-musulmane. Jamais rassasié d'infos,  accro à tous types d'enquêtes et reportages, j'aime explorer le dessous des cartes de dossiers sensibles. En toute liberté. Vos témoignages, vos infos, vos commentaires sont  bienvenus!

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