Frédéric HELBERT, journaliste d'investigation

Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre, il est de porter la plume dans la plaie. (Albert Londres)


Grande absente au procès d’Anders Breivik: la police norvégienne…

Publié le 21/05/2012 à 15h40 | , ,  | Écrire un commentaire

Que faisait la Police norvégienne pendant qu’Anders Breivik tuait encore et encore sur l’Ile d’Utoeya?

C’est une question que l’on entend guère au procès de ce fanatique, qui au nom d’obscures motivations relevant de la psychiatrie lourde, a pu tranquillement pendant une heure et demi, commettre un massacre d’une ampleur inédite. Une heure et demi à tuer, tuer encore, traquer ses cibles, les achever, alors que des les premières minutes de cette boucherie, la police avait été alertée, par de nombreux appels d’urgence émanant de l’île, ou de parents prévenus par leurs enfants qui tentaient d’échapper aux balles d’un tueur impitoyable.

« Une situation impensable estime un homme du GIGN. Une intervention immédiate, une opération lancée dès le début du drame, aurait certainement permis d’éviter un tel carnage. Le tueur aurait pu, du être repéré et neutralisé au plus vite, par exemple par un tireur d’élite, opérant d’un hélicoptère. Dans ce type de circonstances, la rapidité d’exécution est décisive. Déjà, il nous apparait à nous impensable, que les lieux ou se tenait la manifestation des jeunes du Parti libéral norvégien, n’ait bénéficié d’aucune surveillance, qu’aucun dispositif policier d’encadrement minimum n’ait été préventivement déployé ».

Seulement voilà, des policiers, il n’y en avait aucun sur l’ile, lorsque Anders Breivik a débarqué, en tenue de combat, armé jusqu’aux dents… En fait, le seul policier présent (Il était déguisé), c’était lui!!! Ainsi vont les choses au royaume de Norvège, pays d’ouverture, de tolérance extrême, ou il fait bon vivre, ou les policiers sont sous-entrainés, sous-équipés, et se sont montrés en l’éspêce parfaitement désorganisés… Les propos d’une rescapée, qui a témoigné au tribunal, illustre bien l’état des mentalités, qui ont permis une tragédie sans précédent: « L’homme en tenue de policier disait aux jeunes de se rapprocher pour un banal contrôle. Puis il s’est mis à tirer. J’ai entendu, j’ai vu les balles. C’était étrange car d’ordinaire, les policiers (sic) ne font pas usage de leurs armes en Norvège ». Le propos se passe de commentaires.

Pas d’hélico pour les forces spéciales!

Mais le débriefing poussé de cette heure et demi de tuerie, (étrangement ramenée à une heure) montre que l’incurie des forces de l’ordre a dépassé l’entendement: Officiellement prévenus à 17h27 qu’une fusillade se déroulait sur l’île, les hommes mobilisés pour intervenir n’y ont posé le pied qu’une heure et demi plus tard, à 18h25! Et il a fallu encore deux précieuses minutes pour localiser, cerner le tueur, avant qu’il ne se rende… Explication: Le seul hélico disponible, affecté aux  à l’unité d’intervention spéciale de la police, était basé sur un petit aéroport, à une soixantaine de kilomètres de la capitale! « Une faute technique impardonnable juge un anien du RAID. « Dans nos entrainements, nous répétons sans cesse toutes les phases, y compris celle de la mise en action des hommes et des moyens et la capacité de projection de nos forces sur des théâtres de crise dans les délais les plus brefs ». La photo ci dessous, illustre l’absurdité de la situation. C’est une image terrible prise à partir d’un hélicoptère d’une Télé norvégienne, arrivée sur les lieux avant la Police. Et filmant des airs, le tueur en pleine action.

En Norvège alors, dans le chaos ambiant qui régnait après le premier attentat à la voiture piégée à Oslo, c’est un chef de la police locale qui a décidé -je cite- « qu’il serait plus rapide d’intervenir, en l’absence de moyens aériens, par la voie terrestre puis maritime. Nos hommes ont fait aussi vite qu’ils ont pu a plaidé ce responsable quelques heures après la catastrophe. il faut les comprendre: Cela demande du temps d’affréter une unité spéciale. Les agents doivent, s’équiper, enfiler leur gilet-pare balles, puis partir »

C’est là ou la situation, déjà inconcevable, prend des proportions affolantes. Les policiers mobilisés, ont embarqué d’un point situé à 45km de l’Ile(!), avec leurs équipements, à bord d’un bateau trop léger (un zodiac), qui a commencé à couler, et dont le moteur s’est noyé et arrêté sec! Les hommes ont donc du regagner la rive à la nage, et « emprunter » le bateau d’un particulier pour repartir vers l’île. L’unité spéciale n’est donc arrivée qu’une fois le massacre bien accompli. « Au plan opérationnel tranche l’expert du GIGN, tout démontre que rien n’était prêt pour parer une telle situation, que l’indispensable concentration d’hommes, de matériels était inexistante, que la coordination indispensable à la réussite d’une opération-éclair était nulle. ce que tentent de justifier des responsables policiers au nom d’une différence culturelle et sociale est injustifiable et démontre qu’en termes de sécurité, le royaume de Norvège est celui des bisounours! ».

La faillite du Renseignement en amont

Mais ce n’est pas tout. L’enquête a démontré que le tueur préparait son affaire depuis deux ans… Il avait un profil pour le moins inquiétant et « borderline ». Fondamentaliste chrétien, violemment islamophobe, un temps membre d’un parti extrémiste, possédant plusieurs armes, inscrit à un club de tir, affichant sur ses comptes Twitter et Facebook propos et photos inquiétantes, ayant acheté tranquillement 6 tonnes d’engrais, (facilement transformables en explosif surpuissant) pour disait-il son exploitation agricole, il a posté le matin même de sa mortelle randonnée sur le net, un mémo de 1500 pages, mélangeant fatras idéologique et description précise de ce qu’il allait faire, avec en prime quelques conseils techniques pour ceux voulant suivre « sa route ». Et pourtant, pas un seul instant, l’homme n’a éveillé la curiosité d’un quelconque service de police, de renseignement, où de surveillance du net ( si tant est qu’il  en existe un en Norvège). »En termes de prévention du risque terroriste, dans un pays ou l’on sait que sévissent à la fois des organisations islamistes violentes (type Ansar al islam) et en réaction des groupes d’extrême-droite, voire carrément néo-nazi, c’est une faillite totale, estime un membre de la communauté du Renseignement.

Bref ce fut l’échec sur toute la ligne, tout le monde est passé à travers, mais à ce jour, alors que l’assassin de masse comparait devant les juges, aucun des responsables sécuritaires ayant été directement impliqué dans l’opération, si longue et calamiteuse de neutralisation du tueur fou, pas plus que ceux, qui auraient pu intervenir en amont n’ont été inquiété, ni eu de comptes à rendre. Que se passerait-il si demain un nouveau Breivik surgissait? Des leçons ont elles été tirés quant à la responsabilité des autorités dans ce drame inédit? Autant de questions qui restent en l’état sans réponse…


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À propos de l'auteur

Grand-reporter de guerre, (souvent), journaliste d'investigation, multi-médias, tous terrains, membre de l'association de la presse judiciaire, passionné par les phénomènes terroristes depuis le début de ma carrière à Europe11. Tropisme assumé pour le Moyen-Orient et la péninsule arabe-musulmane. Jamais rassasié d'infos,  accro à tous types d'enquêtes et reportages, j'aime explorer le dessous des cartes de dossiers sensibles. En toute liberté. Vos témoignages, vos infos, vos commentaires sont  bienvenus!

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