Frédéric HELBERT, journaliste d'investigation

Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre, il est de porter la plume dans la plaie. (Albert Londres)


EXCLU- Attentat de Karachi: Les découvertes du Juge Trévidic et de la DCRI aux Etats-unis

Publié le 25/06/2012 à 04h39 | , , ,  | 1 commentaire

– REVELATIONS-

Attentat de Karachi, Assassinat de Daniel Pearl, même cause? même effet? Le Juge Trévidic a fait le rapprochement au cours d’une mission d’enquête aux Etats-Unis.

Ce matin, le Juge anti-terroriste Marc Trévidic doit réunir le collectif des victimes de l’attentat de Karachi au Palais de Justice de Paris. Le magistrat cherche toujours à établir s’il y a un lien direct – ou non – entre l’arrêt du versement des commissions/rétro-commissions liées au contrat « Agosta » (vente de sous-marins au Pakistan ) et l’attentat ayant tué 11 employés de la DCN (Direction des Constructions Navales), et blessé une quarantaine d’autres, chargés de construire les sous-marins au Pakistan. L’attentat a été perpétré en 2002 à Karachi, mais c’est en 2007, sous l’impulsion du Juge Trévidic, qu’elle débouche sur l’ouverture d’un volet-financier, qui pourrait être à l’origine de l’attentat… A la base de ce développement, un rapport longtemps resté secret, un rapport d’investigations demandé par la DCN et réalisé par un ancien du conte-espionnage français, le rapport « Nautilus ». C’est ce rapport qui a mis en lumière l’existence d’un système de versement de commissions à des militaires et proches du pouvoir pakistanais, mis en place par le gouvernement Balladur (1993/95), avec une « coquille financière » créée spécialement à cet effet et validée par celui qui était alors Ministre du Budget, Nicolas Sarkozy (document trouvé ultérieurement portant sa signature joint au dossier). Le rapport « Nautilus » émettait comme hypothèse que l’arrêt du versement des commissions décidé par Jacques Chirac, après son élection en 1995, pouvait être à l’origine de représailles s’étant traduit – après plusieurs « avertissements » sans suite – par l’attentat commis contre les employés de la DCN de Cherbourg. A l’appui de cette hypothèse, le rédacteur du rapport évoquait le terrible assassinat du journaliste américain Daniel Pearl, égorgé, puis décapité par ceux qui l’avaient enlevé. Assassinat filmé et mis en ligne sur internet… Selon lui, cet assassinat n’avait pas été commis par al Qaida, mais par des islamistes manipulés par les service pakistanais, en raison d’un lourd différent financier portant sur une vente d’avions de chasse. Des F16 payés par le Pakistan, mais dont la livraison a été bloquée par le Congrès US pour des raisons stratégiques. Le rapport « Nautilus » a fait le parallèle entre les deux affaires. Même cause, même mécanisme, et derrière le paravent d’Al Qaida, une manipulation orchestrée par l’ISI, les services pakistanais, pour obtenir gain de cause et régler le problème des « dossiers impayés ».

A la fin 2011, le Juge Trévidic, accompagné par des hommes de la DCRI, s’est rendu discrètement aux Etats-Unis. Pour savoir si des éléments pouvaient accréditer la version du rapport « Nautilus« . Exceptionnellement, le FBI a ouvert aux enquêteurs français le dossier secret de l’enquête PEARL, sur lequel ils continuent à travailler. Ce matin, le Juge Trévidic devrait expliquer aux familles des victimes, aux rescapés de l’attentat de Karachi et à leur avocat, Maître Olivier Morice, le résultat de cette mission et les « découvertes » qu’il a faites. Des découvertes qui vont dans le sens du rapport « Nautilus« . Elles viennent appuyer  la thèse du rédacteur du rapport et éclairer les liens entre l’assassinat de Daniel Pearl et l’incroyable histoire de la vente de F16 bloquée de longues années durant par le Congrès US. Pour son enquête sur l’attentat de Karachi, seules les similitudes évidentes et troublantes entre les deux dossiers intéressent le magistrat instructeur, mais les éléments qu’il a ramenés des Etats-Unis vont aussi éclairer d’un jour nouveau les circonstances de l’assassinat du journaliste américain.

Daniel Pearl n’a pas été enlevé puis assassiné par des extrémistes d’Al Qaida. Cette thèse selon laquelle Khalid Sheikh Mohammed, cerveau des attentats du 11 septembre, serait aussi, ainsi qu’il l’a confessé après des séances d’interrogatoires au cours desquelles il a été torturé,  celui qui a égorgé de ses mains le journaliste, a été catégoriquement infirmée de vive voix par les enquêteurs spéciaux du FBI rencontrés par le Juge Trévidic et les hommes du contre-espionnage français. Pour les Américains, Daniel Pearl a été la victime d’un groupe d’islamistes pakistanais manipulés ou complices d’une branche de l’ISI, les services spéciaux pakistanais. Il est enlevé à Karachi, le 23 janvier 2002, par un mystérieux groupe, « le mouvement national pour la restauration de la souveraineté du Pakistan », dirigé par un certain Omar Sheikh. Lequel Omar Sheikh était un islamiste « à la pakistanaise », qui travaillait aussi à l’occasion pour l’ISII, service soutenant clandestinement certains réseaux terroristes, ou les instrumentalisant.

C’est exactement ce qui s’est passé dans l’affaire Pearl. Où une étrange revendication est apparue le lendemain de son enlèvement. Réclamant la livraison d’avions de chasse F16, commandés et payés des années auparavant. Mais non livrés suite à la découverte, par la CIA, que les Pakistanais avaient mis au point des mini-missiles nucléaire Sol-Air qui auraient pu armer les F-16. Ni le constructeur ni l’État fédéral américain n’ont voulu rembourser. D’où cette fameuse revendication envoyée par internet après le kidnapping de Pearl. Une revendication restée sans suite. Ce qui fut fatal au journaliste. Le FBI a fourni au juge Trévidic les éléments, notamment informatiques, ayant permis d’authentifier la revendication, ainsi que la copie des aveux partiels d’Omar Sheikh, qui a reconnu devant les enquêteurs du FBI avoir effectivement collaboré avec l’ISI, organisé le kidnapping, mais est resté volontairement pour le moins évasif sur la décision de tuer dans des conditions barbares Daniel Pearl.

Reste que pour le juge Trévidic, les éléments qu’il a récoltés, ramenés, puis fait traduire et joints au dossier vont dans le sens d’une validation du rapport « Nautilus » quant à un lien possible entre la piste financière et la commission de l’attentat de Karachi. « Ce n’est pas une preuve, loin s’en faut, dit un enquêteur, mais c’est un élément de décryptage capital, d’autant que, et ce n’est sans doute pas le fruit du hasard, l’attentat visant les personnels de la DCN a eu lieu la veille de l’ouverture du procès d’Omar Sheikh, ayant été livré par ses protecteurs, sous pression américaine, et condamné à mort par la justice pakistanaise. Peine suspendue en l’état par un appel. L’attentat a aussi été commis a deux pas de l’endroit où a été enlevé Daniel Pearl. La « récolte » auprès du FBI représente un nouveau pas franchi ».

Car là est le point central que les circonvolutions d’une enquête des plus difficiles ont parfois fini par faire oublier. A l’heure qu’il est, 10 ans après l’attentat de Karachi, ceux qui l’ont commis courent toujours, et Justice n’a pas encore été rendue aux victimes et à leur familles.

FH, avec O.P

A suivre: FOCUS et révélations sur la « Story » Daniel Pearl


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À propos de l'auteur

Grand-reporter de guerre, (souvent), journaliste d'investigation, multi-médias, tous terrains, membre de l'association de la presse judiciaire, passionné par les phénomènes terroristes depuis le début de ma carrière à Europe11. Tropisme assumé pour le Moyen-Orient et la péninsule arabe-musulmane. Jamais rassasié d'infos,  accro à tous types d'enquêtes et reportages, j'aime explorer le dessous des cartes de dossiers sensibles. En toute liberté. Vos témoignages, vos infos, vos commentaires sont  bienvenus!

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