Frédéric HELBERT, journaliste d'investigation

Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre, il est de porter la plume dans la plaie. (Albert Londres)


Otages français: En parler publiquement ou pas?

Publié le 25/11/2012 à 19h34 | , , , ,  | Écrire un commentaire

Otages français: le silence ou la médiatisation?

L’ancien otage Hervé Guesquière, qui fut capturé en Afghanistan par un groupe de talibans, avec le caméraman Stéphane Taponnier  le martèle à chaque occasion: Un otage dont on ne parle pas est un otage mort. Il faut en parler tous les jours à la télévision. 

Il l’a redit aujourd’hui alors qu’une petite trentaine de personnes se réunissaient à Paris, autour des familles désemparées, désespérées de 2 des 7 otages français actuellement détenus dans le Sahel.

Nul ne peut imaginer le désarroi de ceux qui vivent dans l’idée permanente que les leurs sont entre les mains d’extrémistes radicaux,de djihadistes ennemis de la France, et experts en business d’otages. Car le marché est juteux. Par delà des revendications politiques souvent extravagantes, les kidnappeurs, quels qu’ils soient exigent toujours des sommes exorbitantes pour libérer ceux qu’ils détiennent, dans des conditions parfois terribles.

La France a hélas a une vieille expérience en la matière-  et si dur cela soit-il pour les familles, faire des comités de soutien, des opérations lächer de ballons, des rassemblements, des émissions spéciales,  lancer des attaques contre le gouvernement, ne sert pas la cause de ceux qui sont privés de libertés et constamment menacés.

Car il est deux choses qu’il faut distinguer clairement:

1- l’appui, le soutien personnel, la présence et le réconfort que l’état d’abord, et tous ceux qui le peuvent se doivent d’apporter, d’une manière ou d’une autre à ces familles désemparées.

2- l’action des services spécialisés, en l’espèce la DGSE, le services spéciaux français, qui sont à la manœuvres dans ce types d’opération qui peuvent s’installer dans la durée.

Dans ces deux domaines, le mot d’ordre que se sont toujours donnés les experts au service de la France est tout faire pour ramener auprès des leurs les otages vivants. Il n’empêche pas les réunions publiques mais implique un nécessaire SILENCE sur les contacts, négociations, opérations qui sont menées par les cellules spécialisées de la DGSE. Ce silence, le peu d’informations divulgué aux familles est douloureux pour elles, mais très loin d’être synonymes d’une inaction, d’un oubli, que seules les manifestations publiques, ou médiatiques permettraient d’éviter.

La DGSE par vocation est un service secret, qui vit dans le secret, agit dans le secret, et l’on ne voit jamais les hommes des cellules spécialisées, ceux de la direction du renseignement, ceux du SA, le service action, tous ceux qui sont sur le pont en permanence  pour tenter d’obtenir la libération des otages français, on ne les voit jamais recueillir « les lauriers des opérations qu’ils mènent, quand des otages sont libérés. Comme le furent ceux du Liban, de Libye, d’Irak, d’Afghanistan, de Somalie ou d’autres contrées lointaines…

« Nous comprenons le désarroi des familles dit un agent qui a travaillé sur plusieurs prises d’otages. Mais entretenir une communication sur l’avancée, ou le recul parfois des négociations, n’est pas de notre ressort. Nous considérons même que cela peut desservir nos objectifs. La médiatisation des affaires d’otages fait toujours immanquablement augmenter les « enchères. Quant à imaginer qu’elle serait nécessaire pour que nous fassions le maximum, et que si l’on ne parlait pas des otages, nous cesserions de bosser, c’est une absurdité, et c’est mal nous connaître. Non Monsieur Guesquière, un otage dont on ne parle pas n’est pas un otage mort« .

A la DGSE, il n’y a pas UN département otage. Pour chaque affaire, chaque cas, sont constitués des équipes différentes, en fonctions de la nationalité, l’identité, les volontés des kidnappeurs. Et du pays ou sont retenus des citoyens français. Les meilleurs experts sont réunis. Pour trouver la solution. Chaque affaire est différente. Et les cellules opèrent 24h sur 24, sept jours sur sept. Le suivi est permanent. Les rapports quotidiens. Dans l’affaire des otages d’AREVA, la libération de deux des otages initialement capturés n’a pas été due au hasard ou à l’unique bon vouloir des islamistes d’AQMI.

« Après dit un ancien homme de l’ombre, il ne nous appartient pas de gérer les souffrances des familles. Ou leurs demandes d’informations. Le mieux que nous puissions faire pour elle est d’aboutir à une libération. Nous, nous rendons compte à l’échelon politique. Au plus haut niveau de l’échelon politique. Qui décide de la marge de manœuvre attribuée à nos services au cas par cas. Comme il appartient à un Ministère comme le Quai d’Orsay d’apporter en fonction de la l’attitude qui lui est laissée  de recevoir ou non les familles, de les tenir au courant de telle ou telle information, en sachant qu’il faut toujours veiller à ce que les preneurs d’otages ne tirent avantage de la « fuite » d’une information importante. Dans ces affaires là, le moindre faux pas peut-être fatal ou occasionner une rupture de contact« .

Malheureusement, il n’y a pas d’autre voie. Les preneurs d’otages ne sont pas des « tendres ». Leurs revendications peuvent varier. Ils sont très attentifs au « tam-tam » médiatique, fait par certains, qui peut compliquer la tâche de ceux chargés de négocier, d’obtenir les libérations.  Les intermédiaires ne sont pas toujours faciles à gérer. Ils peuvent jouer double jeu. Ils ont aussi leurs revendications.  » Par ailleurs explique un ancien du SA, nous agissons souvent en milieu hostile. Comme nous l’avons fait en Irak, ou les anglo-saxons eux avaient choisi de ne jamais rien négocier, et ou nos options diplomatiques faisaient que l’on pouvait sur un terrain de guerre voir venir de n’importe ou un mauvais coup« .

 » Les services opèrent sur un fil  » dit un diplomate, qui fut engagé sur le terrain dans une opération de libération. Des désaccords existent parfois entre les hiérarchies politiques, militaires, diplomatiques… Rien n’est jamais simple. Mais pour avoir vu travailler les hommes qui vont « au contact », même si c’est très dur pour les familles, même si l’attente et l’angoisse sont difficilement supportables,  même si l’on vit dans une société d’hyper-communication, le Silence est une obligation dans les affaires d’otages. Une règle d’or. Ce ne sont pas les « coups de gueule » de gens sincère, ou de ceux qui parfois s’approprient les affaires, et en tirent ou essayent d’en tirer un bénéfice public personnel qui facilitent le job… Ce ne sont pas des jets de ballons qui permettent la libération de nos concitoyens » 

«  Aujourd’hui déplore un ex boss de la DGSE, tout le monde s’en mêle… et quand tout le monde s’en mêle, on se prend tout le monde dans les pattes. Il est évident Que les familles aient besoin de bénéficier d’un réel soutien de leurs proches,  ou de gens de bonne volonté. Il serait bon qu’on leur accorde « un téléphone rouge » ou se trouveraient au bout du fil des spécialistes chargés de les écouter vraiment, de les apaiser, en sachant trouver les mots sans compromettre les opérations. Il est bien qu’ils puissent par l’intermédiairqu’on affiche les visages des captifs partout, que l’on veuille les montrer au 20 heures tous les soirs, nous paraît totalement contre-productif, pour tout le monde. Les femmes et les hommes des services français n’ont pas besoin d’une pression médiatique quelconque, et encore moins permanente, pour savoir ce qu’ils ont à faire, ou pour se souvenir tout d’un coup qu’il est des otages qu’il faut sauvere de médias passer des messages de soutiens aux otages. Mais. Chez nous tout, je répète, tout est fait, pour sortir les ressortissants français, prisonniers de tel ou tel groupe armé au loin, pour les sortir de leur enfer, et les ramener sains et saufs à leurs familles ».

Frédéric Helbert    


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À propos de l'auteur

Grand-reporter de guerre, (souvent), journaliste d'investigation, multi-médias, tous terrains, membre de l'association de la presse judiciaire, passionné par les phénomènes terroristes depuis le début de ma carrière à Europe11. Tropisme assumé pour le Moyen-Orient et la péninsule arabe-musulmane. Jamais rassasié d'infos,  accro à tous types d'enquêtes et reportages, j'aime explorer le dessous des cartes de dossiers sensibles. En toute liberté. Vos témoignages, vos infos, vos commentaires sont  bienvenus!

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