Frédéric HELBERT, journaliste d'investigation

Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre, il est de porter la plume dans la plaie. (Albert Londres)


Intervention miliaire en Syrie: l’émir du Qatar à l’ONU en appelle à la Ligue Arabe

Publié le 25/09/2012 à 22h04 | , , ,  | Écrire un commentaire

L’émir du Qatar veut une intervention militaire arabe en Syrie

L’émir du Qatar, le sheihk Ahmed  ben Kalifa-al Tani, fidèle à lui même, et à ses engagements politiques constants,  a délaissé aujourd’hui  à la tribune de l’ONU, la question des investissements tous azimuts en France, pour revenir à l’actuel sujet majeur de préoccupations, de polémiques, d’oppositions politiques mais surtout d’effroi mondial, et d’inquiétudes constantes pour des lendemains qui s’annoncent toujours plus sanglants dans une Syrie déchirée. Il  a solennellement  réclamé une intervention militaire au pays de Bachar-el-Assad, théâtre d’un bain de sang, de tueries, de massacres et d’horreur au quotidien.

Appel solennel, Ligue Arabe, « l’exemple » du Liban

« Tous les moyens ont été employés, en vain, alors face à l’impuissance actuelle, je demande, a dit d’une voix ferme  l’émir du Qatar, celui qui soutient en sous-main les homme de la rébellion anti-Bachar, que les pays arabes eux-même interviennent, conformément à leur devoir national, politique, humanitaire et militaire, de faire ce qu’il faut pour que le bain de sang s’arrête en Syrie ».

En guise de référence à la possibilité d’une telle intervention, l’émir Ahmed ben Kalifa-al-Tani a fait expressément référence à l’intervention décidée par la ligue arabe en 1976, peu après l’éclatement de la première guerre civile du Liban, de l’envoi d’une force arabe de 30000 hommes au pays du cèdre pour tenter d’y rétablir la paix. Une référence dont on peu se s’interroger sur la capacité à emporter l’adhésion. Car cette force essentiellement composée, tragique ironie du sort, de syriens, avait mis de l’huile sur le feu plutôt que d’apaiser les choses. Les Syriens ayant toujours considéré que le Liban était leur « dépendance », avaient fini par se transformer en force partisane pis force d’occupation totale, après les terribles bombardements de 1986 sur Beyrouth, en réponse à l’irresponsable décision chef du gouvernement d’alors, le général chrétien Aoun (aujourd’hui allié du Hezbollah! ):  déclencher avec de de dérisoires moyens une soit-disante guerre de libération ».

Si sous la pression interne, et internationale, après l’assassinat du premier ministre libanais, Raffic Hariri, (photo ci-contre au coeur du mausolée qui lui est dédié à Beyrouth) décidé à faire que son pays échappe à la tutelle syrienne, le régime de Damas, pris la main dans le sac, organisateur de l’attentat a évacué militairement le Liban, comme on peut le constater encore chaque jour, le pays reste très « infiltré » par de puissantes forces occultes syriennes, barbouzes et autres, ou soutiens politiques ouverts. Il ne fait mystère pour personne par ailleurs de l’alliance stratégique, certes encombrante, mais bien réelle entre Damas et le Hezbollah, dont la « branche » politique dirige un gouvernement, dit d’union nationale, mais  en sa majorité pro-syrien. A Tripoli, ces derniers mois, la grande ville du Nord-Liban proche de la frontière syrienne, des affrontements entre la petite communauté alaouite, très puissamment aidée par la Syrie, des affrontements armés ont fait plusieurs dizaines de morts. ( cf. reportage sur Tripoli dans les deux camps, ITW Ali FODA). Et les rebelles syriens dénoncent la présence de combattants du Hezbollah auprès de l’armée de Bachar el-Assad…

Une demande condamnée d’avance?

Néanmoins le Qatar a franchi le pas ouvertement. La communauté internationale étant incapable de faire quoique ce soit, paralysée par les vétos russes et chinois au Conseil de sécurité de l’ONU, « vétos qui l’arrangent bien dit sous couvert de l’anonymat, un haut gradé de l’armée française, tant on voit mal ce que nous pourrions faire les uns les autres dans ce bourbier, et alors que nous avons déjà perdu beaucoup pour un résultat « nul » en Afghanistan ».

La demande du tout puissant émir d’un si petit pays, ne surprend guère. Son soutien militaire, notamment financier et en armements légers aux rebelles syriens est un secret de polichinelle. Et dans une pirouette prennent quelques libertés avec l’histoire, l’émir Qartari a estimé à la tribune de l’ONU que l’intervention d’une force sous tutelle alors de la ligue Arabe dans les années 70 au Liban avait été « efficace et utile« .  Mais Ahmed ben Kalifa al-Katani aujourd’hui en appelle cette même Ligue Arabe qu’il traitait avec le franc-parler dont il est capable de « lâche et incompétente » lorsque à la veille des élections qui allaient porter Barak Obama au pouvoir en 2009, Israël, pour tenter d’en finir avec les envois permanents de roquettes « Kassam » par le Hamas sur « Sderot », la ville frontalière de Gaza, avait déclenchée une offensive terrible contre la bande de Gaza, offensive qui avait fait plus de mille victimes dont plusieurs centaines d’enfants, et causé des déstructions sans précédents, sans pour autant décapiter le Hamas et sa force de frappe. (opération aimablement baptisée « Plomb durci » que j’avais alors couvert de Jérusalem, pour de BFMTV, Israël ayant alors bouclé le passage vers Gaza pour les journalistes).

L’appel de l’émir du Qatar risque donc fort de rester vain, dans la mesure notamment ou le monde « arabe-musulman » est lui même traversé par de fortes divergences internes, en proie à ses propres difficultés, et parfaitement divisé sur la question syrienne. Il y a ceux qui y estiment sincèrement que Bachar el-Assad est le seul symbole d’une forte résistance à l’ennemi commun israélien, ceux qui voudraient sa perte, ceux qui craignent une déstabilisation majeure de la région, ceux, les chiites essentiellement qui se rallient derrière le pouvoir alaouite syrien, pour contrer les sunnites constituant en Syrie, la majorité et le fer de lance de l’opposition armée syrienne. Ceux qui estiment qu’il est urgent de ne rien faire…

La tragique impuissance de l’ONU

Bref, le casse tête reste entier,  et il y a fort à parier que les volontés de l’émir du Qatar restent lettre morte, que le conflit d’une sauvagerie inouïe se pourusive à huit-clos, malgré les souhaits sincères, ou ceux, peu crédibles, exprimées par des pays qui n’ont en réalité aucune intention d’intervenir, se poursuive sans qu’aucun des deux camps n’emporte de victoire décisive, et que le bain de sang continue… Même la demande essentielle des rebelles syriens, celle que l’Occident impose une « no fly-zone » qui priverait l’armée régulière de Bachar el-Assad d’un appui aérien pour l’heure décisif et effroyablement meurtrier, (initiative appuyée aussi par le Qatar,  ne parvient pas à recueillir une adhésion des chefs politiques, ou des chefs d’état-majors occidentaux.

L’ONU est bien sur la Syrie, le théâtre d’ne tragique impuissance à réussir à imposer la paix, à trouver une voie politique ou militaire, qui permettrait de renverser les équilibres en Syrie, ou d’imposer une paix par un moyen ou un autre. Pendant ce temps, sur le terrain, ce sont les armes qui continuent à parler, et le sang continue à appeler le sang…

Frédéric Helbert


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À propos de l'auteur

Grand-reporter de guerre, (souvent), journaliste d'investigation, multi-médias, tous terrains, membre de l'association de la presse judiciaire, passionné par les phénomènes terroristes depuis le début de ma carrière à Europe11. Tropisme assumé pour le Moyen-Orient et la péninsule arabe-musulmane. Jamais rassasié d'infos,  accro à tous types d'enquêtes et reportages, j'aime explorer le dessous des cartes de dossiers sensibles. En toute liberté. Vos témoignages, vos infos, vos commentaires sont  bienvenus!

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